Elles étaient cinquante. Cinquante jeunes filles venues des coins reculés du territoire de Mwenga, dans l’est de la République démocratique du Congo. Pendant six jours, elles ont écouté, partagé, appris et surtout… décidé de changer les choses.
Réunies à l’hôtel « Bana Mwenga » du 27 juin au 2 juillet 2025, ces participantes ont suivi une série de formations dans le cadre du projet « Wasichana na Amani », qui signifie Les filles et la paix en swahili. Un projet mis en œuvre par Kvinna Till Kvinna, avec l’appui financier du Fonds des Nations Unies pour la Consolidation de la Paix (UNPBF), à travers La Prunelle RDC asbl et d’autres organisations de jeunes.
Au menu : leadership féministe, résolutions onusiennes 1325 et 2250, égalité de genre, gestion des conflits, plaidoyer et communication via les réseaux sociaux. Mais au-delà des modules, c’est une véritable remise en question des normes patriarcales qui s’est opérée.
Mitamba Kibasomba Daniella raconte : « Ce qui m’a marquée, c’est qu’on peut remettre en cause la coutume si elle nuit à nos droits. J’ai compris que le genre est une construction sociale. Et moi, je m’engage à sensibiliser d’autres femmes et les hommes aussi. À Mwenga, trop de règles nous réduisent au silence. »
Quand les stéréotypes s’effondrent
Rachel Cheko Musombwa, une autre participante, revient sur un moment clé : « On nous a expliqué la différence entre être leader et exercer du leadership. Moi, je croyais que c’était réservé aux hommes. On a aussi parlé du mentorat. C’est décidé : je vais en chercher un et devenir mentor à mon tour. »
Briser les tabous autour de l’éducation et de l’héritage
Mbilizi Kishibisha, quant à elle, a vu s’écrouler un vieux mythe : « Depuis l’enfance, on nous dit que la femme doit rester à la cuisine. Mais on a appris ici que toute femme a droit à l’héritage, à l’éducation et aux postes de décision. Je vais transmettre ce message aux femmes des villages les plus éloignés. »
Les médias comme levier d’émancipation
Pour certaines, la découverte du pouvoir des médias a été une révélation.
Kabesha Watunakanza Véronique explique : « Avant, je n’imaginais pas qu’une femme pouvait utiliser les réseaux sociaux pour faire passer ses idées. On nous a montré comment les médias peuvent être des outils de lutte. Désormais, j’invite les femmes de Mwenga à se familiariser avec ces outils. »
Pour les organisateurs, ces témoignages confirment l’objectif du projet : éveiller une conscience collective et individuelle.
Louis-Patricien Maroyi, facilitateur de La Prunelle RDC, insiste : « Ces jeunes filles ne veulent plus être spectatrices. Elles sont prêtes à devenir actrices du changement, à prendre part aux décisions et à défendre leurs droits. »
Même sentiment chez Ghislaine Misanzila, point focal du projet dans la zone : « Elles ont été attentives, dynamiques, pleines d’idées. Je suis confiante : elles vont semer les graines de la paix et de l’égalité dans chaque recoin de Mwenga. »
Le projet « Wasichana na Amani « ne s’arrête pas là. Après Walungu et Mwenga, d’autres territoires sont concernés avec d’autres organisations des jeunes. Car chaque jeune fille qui comprend ses droits devient une alliée pour la paix, la justice et la transformation sociale.
Et à Mwenga, une chose est désormais sûre : le silence des filles est terminé. Elles parlent. Elles agissent. Elles résistent.
Rappel
Il faut rappeler que le projet « Wasichana na Amani » vise à renforcer la participation significative des jeunes femmes dans les processus de paix et les décisions politiques en République Démocratique du Congo, en particulier dans la province du Sud-Kivu.
« Wasichana na Amani » a pour ambition d’accroître la participation des jeunes femmes à la consolidation de la paix et à la politique en RDC.
Il s’étend sur une période de 24 mois, de août 2024 à juillet 2026, dans quatre territoires (Walungu, Kabare, Mwenga et Kalehe) et deux villes (Bukavu et Uvira).
Cinq organisations partenaires, dont trois dédiées aux jeunes femmes ainsi que deux organisations de femmes participeront à la mise en œuvre du projet.