Les Acteurs impliquées dans la justice pénale internationale, soit à titre académique, soit à titre professionnelle, soit à titre institutionnel, devraient lever de nouvelles options juridiques et extra-juridiques pouvant permettre aux victimes de crimes internationaux d’accéder aux réparations prononcées à l’issue de différents procès.
C’est à ce titre que s’est tenue à Kinshasa, le 02 Décembre 2021, la conférence-débat organisée par RCN Justice & Démocratie dans le cadre du projet « Soutenir les efforts de la lutte contre l’impunité en RDC » en partenariat avec Avocats Sans Frontières et TRIAL Internationale, sous le thème : « Le Droit à la réparation des victimes des crimes internationaux en RD Congo : Etat de la recherche, de la jurisprudence et perspectives ».
Cette conférence fait suite à la recherche commanditée par Avocats Sans Frontières « dépasser le statu quo en matière de réparations en RDC : Enjeux et perspectives » dont les résultats ont fait l’objet de l’intervention de la Professeure Sarah LIWERANT, Directrice de l’école de criminologie de l’Université de Kinshasa.
Des échanges en trois temps forts.
L’accès à des mesures de réparations effectives et adéquates est l’un des enjeux d’accès à la justice des victimes internationaux en RDC ; il apparaît comme une priorité, et ce à plusieurs niveaux. Apporter l’éclairage du chercheur et du praticien sur la question du droit de la réparation des victimes de crimes internationaux en RDC et de proposer de nouvelles réflexions sur cette thématique afin de créer un débat de haut niveau sur la question et d’éprouver et élargir les propositions des participants. Tel est l’objectif de l’activité comme présenté par le Chef de mission de RCN J&D en RDC, Mr Brian MENELET, dans son mot de bienvenue.
Ensuite, les participants ont eu droit à trois interventions, suivi des questions réponses qui ont porté sur :
- La présentation de la synthèse de l’étude « dépasser le statu quo en matière de réparations en RDC : enjeux et perspectives », Par Professeure Sarah LIWERANT.
- La présentation par ASF de l’évolution jurisprudentielle en matière de réparation depuis la fin de l’étude. Par Dominique KAMUANDU, Coordinateur Thématique ASF.
- La présentation sur les modalités et bases juridiques de la réparation. Par le colonel Martin EKOFO, Magistrat de la Haute Cour Militaire.
Les victimes comme pièce maitresse d’un processus de réparation
Au cours de cette conférence, La Professeure Sara LIWERANT a présenté d’autres conclusions auxquelles a abouti l’étude. En somme, a-t-elle expliqué, les victimes dans l’attente du versement des réparations prononcées, c’est la déception.
Pour elle, il faut lever les options juridiques et extra juridiques capables d’activer les réparations au profit des victimes des crimes internationaux.
« Ce qui se dégage des discours des victimes qui ont été impliquées dans un processus judiciaire, on voit effectivement que dans l’attente du versement des réparations qui leur ont été octroyées, il y a évidemment une forte déception. On se rend compte aussi que l’accompagnement des victimes procède de la réparation. Cela nécessite donc de retravailler la méthodologie d’accompagnement des victimes. Il y a eu d’autres conclusions qui conduisent finalement à dire que le droit n’est pas tout. Et donc il serait intéressant de lever des options juridiques certes mais aussi de les articuler avec des dispositions extra-judiciaires qui pourraient répondre notamment aux besoins immédiats des victimes mais aussi à leurs besoins à court et moyen terme. Nous avons aussi compris que les victimes préfèrent les réparations individuelles mais ne s’opposent pas pour autant aux réparations d’intérêt communautaire par ce que toute la communauté a subi », explique Sara LIWERANT.
Ces propos ont été soutenus par d’autres acteurs et intervenants dans le secteur de la justice. C’est le cas le colonel Martin Ekofo, magistrat à la Haute Cour Militaire de la République Démocratique du Congo. Selon lui, il faut des réformes pour y parvenir.
«à l’état actuel de la législation, la réparation en faveur des victimes des crimes internationaux ne suit pas. A cet effet, il faut qu’il y ait une réforme de manière à ce que certains éléments que nous avons critiqués puissent être pris en charge. C’est notamment la réparation poste par poste, la place de l’avocat et de l’expert, les formes de réparation doivent être repensées mais aussi les formes de réparation doivent changer et en plus réfléchir sur comment déconnecter la réparation au procès pénal », recommande-t-il.
Rappelons qu’en dépit des avancées enregistrées dans la répression des crimes internationaux notamment avec l’appui des organisations réunies au sein de la Task Force Justice Pénale Internationale, les réparations en faveur des victimes peinent à se matérialiser.
Ainsi, des idées jaillissent déjà sur la pertinence de créer « un fonds de réparation » qui devrait servir à combler ce gap et ainsi offrir un accompagnement total aux victimes des crimes internationaux.
Article rédigé avec le soutien et l’appui financier de RCN Justice & Démocratie.