La Cour Constitutionnelle continue à rendre des arrêts dans le cadre des contentieux des élections législatives nationales en République Démocratique du Congo. Les derniers arrêts ont été rendus dans la soirée de lundi 10 juin 2019.
A travers ces arrêts, la Cour Constitutionnelle a invalidé 33 députés nationaux parmi lesquels 23 de la coalition Lamuka. Ces arrêts ont suscité mille et une réactions non seulement dans la classe politique, le monde intellectuel ainsi que dans les bases respectives des députés invalidés.
Pour le constitutionnaliste et professeur de Droit à l’Université de Kinshasa André Mbata, ces arrêts sont contraires à la loi et à la Constitution car ils ont été rendus plus de deux mois après l’expiration du délai endéans duquel ils devraient être rendus.
Dans un entretien avec Radio Maendeleo, jeudi 13 juin 2019, il estime que, sur base de cela, ces arrêts ne devraient pas être exécutés.
« dans ce dossier des arrêts de la Cour Constitutionnelle je suis déjà intervenu plus d’une fois. Déjà au mois de Mai je m’étais prononcé en disant que la Cour Constitutionnelle, comme le veut la Constitution, devait rendre ses arrêts en matière des contentieux des élections législatives dans deux mois. Le constituant fixe le délai de deux mois et au cours duquel la Cour doit épuiser les contentieux en matière des contentieux des élections législatives. Et si les calculs sont bons, la Cour devrait avoir clôturé ce travail. S’il faut faire une lecture attentive de la Constitution, personnellement je serais contre l’application de tels arrêts parce qu’ils sont rendus en dehors du délai légal. L’article premier de la Constitution dit que la République Démocratique du Congo, notre pays, est un Etat de Droit. Un Etat de droit est un Etat dans lequel tout le monde est soumis à la loi. La Cour Constitutionnelle elle-même n’est pas au-dessus de la loi. La Cour Constitutionnelle doit se conformer à la loi. Nous sommes donc dans une situation malheureuse et scandaleuse. Et si vous demandez un avis personnel, je vous dirai que ces arrêts violent la loi, ces arrêts violent la Constitution et ces arrêts ne devraient pas être appliqués par qu’ils ont été prononcés hors des délais prévus par la loi elle-même », argumente Mbata avant de poursuivre en disant que la Cour Constitutionnelle ne donne aucun exemple aux autres juridictions «… imaginez-vous, par exemple, qu’il n’y a plus de délai et que le Tribunal de Grande Instance de Bukavu prenne une affaire en délibéré et prononcer un jugement dans cinq mois, c’est inacceptable. Je pense que le Président de la République qui a fait de l’Etat de droit son cheval de bataille doit bien regarder cet état de chose. La Cour Constitutionnelle doit être la première à prêcher par l’exemple…».
Le Professeur André Mbata appelle par ailleurs les congolais à ne pas baisser les bras mais de se lever et continuer à combattre pour l’avènement d’un véritable Etat de droit démocratique en République Démocratique du Congo.
« je ne suis pas pessimiste. L’avenir du pays est ce que nous allons décider qu’il soit. C’est-à-dire que nous qui jurons tous les jours que nous allons bâtir un pays plus beau qu’avant et ça doit être le cas. Je suis donc optimiste, nous devons bâtir un pays plus beau qu’avant. Mais pour y arriver nous devons combattre les antivaleurs comme la corruption, le clientélisme, le régionalisme, le tribalisme et bien d’autres. Et pour moi en tant que juriste, je vous dirais : il nous faut un Etat de droit démocratique. Les chrétiens vous diront, la Justice élève une Nation. Sans la justice, nous ne pouvons pas bâtir un pays plus beau qu’avant mais nous allons y arriver progressivement. Nous nous sommes battus pendant plusieurs années pour qu’il n’y ait pas révision des articles intangibles de la Constitution qui pourrait donner un troisième mandat à un Président de la République. Nous y sommes arrivé mais le combat n’est pas terminé. La lutte continu et la lutte doit continuer. Nous avons fait un pas, nous ne pouvons pas dormir sur nos lauriers… », précise André Mbata.
Il se dit surpris de voir que ce sont plutôt les députés de l’opposition qui soient plus visés à travers ces arrêts de la Cour Constitutionnelle mais aussi d’apprendre que certains de ceux qui ont été validés n’ont eu qu’une centaine de voix.