Par Etienne Mulindwa
Plus de 20 conflits sont déjà traités et résolus pacifiquement par les radio-clubs partenaires de Radio Maendeleo de l’axe Kavumu, groupement de Bugorhe dans le territoire de Kabare depuis le debut de l’année 2021.
En plus des conflits clôturés, plus de 15 sont en cours de traitement alors que d’autres ont été référés aux instances compétentes comme par exemple à la justice ou encore au niveau des autorités du groupement.
Parmi les conflits traités, l’un des médiateurs et membre du radio-club Biega Honorine Nankafu parle des conflits fonciers, ceux liés à la succession ou partage d’héritage, séparation de couple et abandon d’enfants, les accusations de sorcellerie ainsi que les conflits liés aux rachats d’enfants.
Elle précise que certains de ces conflits avaient déjà duré plus de six jusqu’à diviser des familles car plus de 70% affectent les femmes et les enfants dans le groupement de Bugorhe en particulier et le territoire de Kabare en général.
Honorine Nankafu salue l’accompagnement des autorités dans ces activités de médiation et promet de faire encore plus pour atteindre plus de résultat.
« ce n’est pas nous qui allons vers les gens. Ils viennent d’eux-mêmes. Nombreux qui sont déjà passés ici chez nous partent dans la communauté pour sensibiliser les autres. Ils viennent régulièrement et en grand nombre. Parfois nous avons des dossiers qui nous viennent même très loin de Kavumu mais on ne peut pas les renvoyer… les conflits sont récurrents ici chez-nous et ils sont de plusieurs natures. Il y a des conflits fonciers, ceux liés à la succession et bien d’autres. Ces conflits affectent beaucoup plus les enfants et les femmes. Ce sont eux qui sont les premières victimes. Il y a des confits qui ont totalisé même plus de cinq ans et qui ont eu des conséquences jusqu’à occasionner des morts. Bien qu’avec difficultés, nous essayons de travailler pour réduire la fréquence des conflits et leurs conséquences… », explique-t-elle.
Pour certains bénéficiaires des médiations, la présence des radio-clubs comme structures de médiations mises en place par Radio Maendeleo à la base constitue un ouf de soulagement et contribue véritablement à la cohésion sociale.
L’un d’eux Jean Paul Cishibanji explique que sa famille était déjà divisée des années et son épouse le faisait arrêter presque chaque semaine. C’est grâce au radio-club que la paix est revenue et la vie commune dans un foyer stable a repris.
« mon épouse m’a causé de grands problèmes. Nous vivions dans une même maison mais elle me faisait arrêter presque chaque semaine. J’ai vraiment souffert au point que j’ai quitté ma maison et j’étais sur le point de lui faire subir le même sort. J’ai vraiment manqué la paix et cela a duré des années. C’est seulement grâce au radio-club que nous avons réussi à nous parler à nouveau. Aujourd’hui tout se passe bien. Nous nous sommes entendus. A présent, les enfants étudient très bien malgré les difficultés. Nous disons merci au radio-club Biega pour son accompagnement. Sans cela, nous serions vraiment en difficulté »¸témoigne Cishibanji.
Même son de cloche pour Sévérine M’Mishebeyi qui s’est vu obligé d’aller en justice pour réclamer ses droits auprès de son patron. Essoufflée et sans espoir d’avoir gain de cause, elle s’est rabattue au radio-club.
« nous travaillions pour une personne qui vit à Bukavu. Après plusieurs mois de travail, nous avons réclamé nos droits mais parce qu’il se croyait plus fort que nous, il nous réservait le silence au point que nous en avons souffert. J’étais prêt à aller en justice. J’ai d’ailleurs saisi la police mais je n’ai pas eu gain de cause. Je n’avais pas de choix. C’est lorsque je suis allé au radio-club que nous avons été consolé. En réalité, nous n’avons pas encore eu notre dû mais nous sommes confiants. Ce conflit nous avait déjà affectés terriblement et on n’avait pas le choix », renseigne-t-elle.
Pour le Président de la société civile du groupement de Bugorhe Justin Mulindangabo, le travail abattu par les radio-clubs partenaires de Radio Maendeleo dans le cadre de la résolution pacifique des conflits est un travail remarquable pour la communauté.
Il explique que cette approche a sensiblement contribué à la réduction des conflits et tensions entre habitants. Justin Mulindangabo pense que Radio Maendeleo devrait renforcer sa présence dans d’autres coins de Bugorhe afin d’atteindre toutes les couches.
« je vais commencer par saluer le travail exécuté par Radio Maendeleo. C’est une radio sans laquelle nos voix ne peuvent pas être entendues. Nous la remercions surtout pour avoir pensé à cette thématique liée à la résolution pacifique des conflits via les radios-clubs. Ici chez nous à Bugorhe, de petits dossiers de dettes, de rachat d’enfants voire quelques dossiers bénins étaient gérés par la Police, l’Armée et même l’ANR. Ici, les habitants perdaient non seulement de l’argent mais aussi leurs biens et leur temps », renseigne Justin Mulindangabo avant de venter le travail exécuté par les radio-clubs « c’est vrai, le radio-club Biega existait depuis longtemps mais il ne s’intéressait pas trop aux médiations. Depuis l’intégration de cette approche, je le dis avec conviction, les conflits ont sensiblement diminué. Cela se justifie car même moi à mon bureau je recevais des gens qui venaient me parler de leurs conflits mais aujourd’hui la fréquence a diminué… néanmoins, je dois rappeler que le groupement de Bugorhe a 7 villages. Il serait mieux que radio Maendeleo renforce sa présence dans ces derniers afin d’atteindre même les personnes les plus éloignées ».
Signalons que le travail de résolution pacifique des conflits mené par les radio-clubs s’inscrit dans le cadre du projet « Projet d’information et de communication participative par la Radio sur la résolution pacifique des conflits à Walungu, Kabare et Kalehe dans la province du Sud-Kivu ».
Ce projet est exécuté par Radio Maendeleo à Walungu, Kabare et Kalehe avec le soutien financier de la Coopération Allemande GIZ.